Depuis six mois nous cherchons à perfectionner les pratiques et les résultats des évaluations heuristiques effectuées par l’équipe de Yu Centrik. Dans ce type d’activité, nous nous intéressons à évaluer la qualité de « l’expérience de l’utilisateur » au delà de l’utilité ou de l’utilisabilité qu’un dispositif ou qu’un système interactif puisse offrir.

L’objectif d’une évaluation heuristique est bien sûr d’identifier les aspects d’une interface qui défient l’expérience de l’utilisateur. Ce type de technique s’applique lorsque certaines contraintes (temps, budget, équipements, compétences,…) ne permettent pas l’observation de l’expérience utilisateur in loco ou in lab. Pour ces projets, il est plus rentable de procéder à une évaluation de l’interface à l’aide des heuristiques, principes et critères ergonomiques. Les évaluations heuristiques se basent alors sur un postulat général : une interface qui respecte les principes ergonomiques est la base d’une bonne expérience utilisateur.

Expérience utilisateur

Pour pouvoir évaluer l’expérience de l’utilisateur telle que modélisée ci-dessus, nous avons besoin des heuristiques, principes et critères ergonomiques assez porteurs.

Figure 2 : vue générale sur l’organisation des principes d’ergonomie généraux (au centre) et appliquées (dans la périphérie) que nous prenons en compte lors des évaluations heuristique réalisées par Yu Centrik.

Nous pensons qu’en travaillant au niveau général et appliqué nous pouvons évaluer avec une quasi exhaustivité les différents types d’interface et assurer une meilleure qualité pour les diagnostics. On ne cite jamais assez sur ce sujet les travaux de Jakob Nielsen qui montrent que les doubles spécialistes, connaissant à la fois les exigences du domaine et les principes ergonomiques, sont les plus performants dans les évaluations expertes.

Figure 3 : Performance relative des évaluateurs selon le niveau de compétence en utilisabilité (Source : J. Nielsen – Usability Engineering , 1996). Ces résultats font référence à des évaluations expertes (basées sur l’expérience des évaluateurs) et non pas à des évaluations heuristiques (lorsque les évaluateurs sont guidés par des heuristiques). Néanmoins, lorsque les évaluateurs sont guidés à la fois par des principes généraux et appliqués nous pouvons nous attendre à des résultats plus complets et pertinents.

Principes généraux pour les interfaces Graphiques

Nous développons une démarche générale et des outils d’aide aux évaluations heuristiques à partir des modèles présentées ci-dessus. Néanmoins, au lieu de travailler avec différents groupes de standards d’ergonomie reconnus, nous avons défini notre propre ensemble de principes ergonomiques généraux pour des interfaces graphiques. Cet ensemble est le résultat d’un effort d’intégration de 5 groupes de critères, principes, heuristiques et règles d’ergonomie les plus connus.

• Heuristiques de Nielsen
• Règles d’or de Shneiderman
• Principes de dialogue – ISO 9241 :10
• Critères ergonomiques Bastien et Scapin
• Critères de Bruce Tognazzini

Nous avons décidé de retenir la structure proposée par les Critères Ergonomiques de Bastien et Scapin, qui nous semblait la meilleure, et d’y ajouter d’autres principes pertinents. Le résultat est présenté dans le tableau qui suit.

Nous cherchons continuellement à identifier ou à définir d’autres ensembles de principes au fur et à mesure que des mandats concernant différents types d’interfaces et domaines soient accordés aux équipes de Yu Centrik. Nous avons déjà des critères généraux pour les interfaces vocales et pour les téléphones cellulaires. En ce qui concerne les principes spécialisés, nous en avons identifiés pour le commerce électronique et le gouvernement en ligne (voir figure 2).

Je vous ai présenté ici les caractéristiques principales du cadre conceptuel que nous développons pour les évaluations heuristiques effectués par Yu Centrik. Je vous parlerai, dans les prochains articles, de la démarche suivie pour ce type d’évaluation et des résultats que nous avons pu obtenir après quelques mois d’application de cette approche. En effet, notre démarche et nos outils d’évaluation nous ont déjà permis de classifier à ce jour une base de 500 problèmes ergonomiques. Nous avons pu observer que 35 % sont de nature «critique» ou « sévère » et demandent un niveau d’effort « facile » voire « très facile » pour les résoudre. Un argument qui devrait encourager quiconque à mettre en place ce type d’évaluation.