Ce sont 5 intervenants liés au domaine du jeu vidéo et venant de spécialités variées qui ont présenté leur vision du jeu d’aujourd’hui et de demain lors de la quatrième conférence Interfaces sur les nouvelles frontières du jeu.
Nous avons eu des interventions en termes de chiffres et d’emplois, mais aussi en termes d’industrie, de conception, d’interactions…
L’un des intervenants, Jonathan Morin d’Ubisoft et travaillant sur le projet Far Cry 2 , nous propose une conférence intitulé : Les jeux prévisibles : Comment éviter les expériences préconçues dans le « game design » . Voici une petite synthèse montrant l’idée directrice.
L’exécution d’une tâche peut avoir un coût cognitif différent selon son niveau de complexité, sa familiarité, sa concurrence avec une autre tâche… Un des objectifs de l’univers du jeu vidéo est d’éviter que le joueur ne développe une expertise telle qu’il entre dans un niveau d’abstraction basé sur les habiletés.
Cela risque d’engendrer un phénomène de lassitude et une perte de motivation qui pourrait aboutir à l’abandon du jeu vidéo en question.
Un point essentiel évoqué par Jonathan Morin est l’importance de rendre l’univers d’un jeu vidéo le moins prédictible possible pour maintenir le joueur à un niveau de comportement basé sur les règles et les connaissances. Le modèle de Rasmussen illustre parfaitement le modèle de prise de décision et l’évolution des automatismes. (Fig. 1)
Skill Based (Habileté)
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Schèmes, Patterns d’actions qui nécessitent un minimum de ressources.
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Rule Based (Règles)
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Procédures mentales où un niveau supplémentaire d’analyse est nécessaire. À partir de ses perceptions, l’humain doit reconnaître une situation, sélectionner une règle appropriée avant d’entreprendre son action
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Knowledge based (Connaissances)
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Connaissances déclaratives. Sur la base des connaissances mémorisées et de processus analytiques, le plan d’action est élaboré.
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Fig. 1 – Modèle de Rasmussen (1986)
Pour expliquer ce raisonnement, Jonathan Morin nous a présenté 2 jeux, simples et connus de la plupart des gens : Mario Bros et Pac-Man.
Dans le premier, il part du constat qu’un jeu comme Mario Bros tend à être approprié au point de mettre en place des patterns qui font que le joueur n’a plus vraiment un contrôle conscient du jeu. Il a développé des automatismes.
D’un autre côté il nous montre l’intérêt d’un jeu comme pac man, dans lequel le déplacement aléatoire des fantômes force le joueur à mettre en place des stratégies. Le joueur se base ici sur des règles.
Finalement, l’humain s’adapte à l’environnement du jeu et apprend à réagir en fonctions d’évènements. C’est là que la rétroaction est importante : faire en sorte que l’environnement puisse réagir ET apprendre du comportement du joueur.
Imaginez un jeu de combat ou l’ordinateur serait capable – en fonction de vous – de faire émerger un comportement dans le but de vous surpasser. Vous êtes alors forcé de mettre en place de nouvelles stratégies pour accomplir votre objectif. Cela mobiliserait continuellement vos ressources cognitives, vous immergeant dans le jeu et vous coupant pour un temps de la réalité.
Bien sûr, atteindre cet objectif n’est pas nouveau, mais je ne crois pas qu’on y soit encore réellement parvenu. Par ailleurs, il est amusant de se dire qu’en ergonomie des interfaces nous cherchons généralement à donner beaucoup de prévisibilité pour que la tâche des utilisateurs soit efficace et efficiente 🙂
Avoir le point de vue d’intervenants professionnels et de pouvoir les rencontrer est toujours une expérience enrichissante et nous remercions la SAT (Société des Arts Technologiques) d’organiser régulièrement ces évènements. D’ailleurs, la vidéo de cette conférence devrait être sur leur site cette semaine.
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